Paroles de migrants, Miya

Paroles de migrants, Miya

Miya

Est-ce vraiment le racisme que Miya découvre à l’âge de 9 ans quand, née à Madagascar, elle déménage avec ses parents sur l’île de la Réunion et se souvient très bien de cette petite phrase que lui lance une fille de sa classe: « Retourne chez toi » !

L’auteure de cette phrase n’a pas vraiment une couleur de peau différente de Miya. L’île, pratiquement inhabitée jusqu’au 17e siècle, est aujourd’hui le plus authentique Melting pot de la planète. On y croise des dizaines de couleurs de peau différentes, des colons européens installés là depuis des siècles aux anciens esclaves venus d’Afrique, en passant par les commerçants asiatiques, les chinois, les indiens, sans oublier les militaires et touristes de passage.…Raciste bien sûr, la phrase envoyée à Miya est l’exemple type du racisme de « ceux qui sont nés quelque part » et qui décident une fois pour toutes que, nés à tel endroit, ils possèdent cet endroit et, sur l’île de la Réunion, ce sont le plus souvent les Malgaches, Comoriens et Mahorais nés à quelques encablures, qui en subissent les conséquences. Par exemple les malgaches sont appelés là-bas : « malgachine », un mot à connotation négative.

Cette peur de la différence, peur des gens qui viendraient « manger notre pain » n’a rien à voir avec les théories racistes fumeuses du XIXe siècle, c’est un racisme de pauvres gens et peut-être le pire de tous car il se loge durablement dans la tête de ses victimes.

Préparant aujourd’hui à Paris le concours de la magistrature, Miya ne peut pas dire qu’elle a été réellement victime du racisme, mais lâche quand même cette phrase glaçante :

« Aujourd’hui encore, quand je suis en présence d’un blanc, d’une blanche, et avant même qu’une parole soit prononcée, je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il ou elle m’est supérieure, avec une meilleure instruction ».

Avril 2022

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