Un documentaire suivi d’une conférence
ADS a choisi d’aborder le thème de la fin de vie, un thème délicat qui nous touche tous. Cette soirée, organisée par Anne-Marie Lambert et Marianne Lederer, fait suite au café-débat du 10/10/2020 dont la conclusion avait été de poursuivre par une conférence ouverte au public, et d’aborder le thème à partir d’un film. Le choix s’est porté sur la projection du documentaire d’Anne Georget, « Quand un homme demande à mourir » (2011).
La salle Dolto a accueilli quarante personnes venues de Bourg-la-Reine et des environs pour cette soirée, un public de personnes se sentant concernées et des personnes des associations « Le Choix », « ADMD », ou « Ultime Liberté ».
La soirée a débuté par la projection du documentaire, suivie d’une conférence d’Emmanuelle Huisman-Perrin, professeur de philosophie. Le documentaire est avant tout un témoignage, témoignage d’un homme d’une cinquantaine d’années atteint d’un locked-in syndrome (syndrome d’enfermement dans un corps qui ne répond plus – tétraplégie et incapacité à parler, à communiquer sauf par mouvements oculaires codés – ou, dans ce cas-ci, par le mouvement d’un seul doigt), témoignage d’une famille, sa femme, ses filles, son frère, sa belle-sœur qui l’accompagnent pendant son long combat et acceptent, par amour pour lui, son désir de mettre fin à sa vie.
Emmanuelle Huisman-Perrin a ensuite commenté le film apportant un éclairage très intéressant rappelant certains passages pour faire comprendre ce qui se passe tout au long du processus chez le malade, la famille, les médecins et tous les soignants. En résumé, elle nous a montré que le film met en évidence le choc du diagnostic, l’espoir puis le constat d’une impossible amélioration, ce qui mène à sa demande de mourir. Il montre aussi l’attitude des équipes médicales qui font de leur mieux pour le soigner, mais ne tiennent pas compte des désirs du malade. Après différents établissements hospitaliers, le patient arrive à Berck où sa demande est jugée irrecevable par l’équipe médicale qui refuse de lui administrer une sédation profonde et continue, comme la loi Leonetti votée en 2005 en donne la possibilité. Le combat continue donc pour le patient et sa famille qui fait intervenir le Centre d’éthique clinique de l’Hôpital Cochin. Les débats entre les uns et les autres montrent la complexité du problème et la très difficile recherche d’une solution acceptable par tous. Devant le refus réitéré des soignants de Berck, le patient est accueilli dans une maison de soins palliatifs à Paris où une sédation profonde et continue lui est administrée. Il met trois semaines à mourir, une longue agonie…
Le problème de la législation actuelle est posé. Il est le plus souvent très difficile, pour diverses raisons, de mettre en œuvre la sédation profonde et continue comme le prévoit la loi, même si elle a été modifiée en 2016.
Emmanuelle Huisman-Perrin revient ensuite sur les points saillants du documentaire pour en tirer un certain nombre de conclusions, sur la nécessité d’une formation des soignants qui se cachent derrière le serment d’Hippocrate, pour soigner coûte que coûte quitte à laisser souffrir. Elle met en évidence les manques de la loi Claes/Léonetti. Force est de constater l’hypocrisie qui consiste à endormir le malade tout en le privant de nourriture et surtout d’hydratation ce qui engendre des souffrances longues et, évidemment, inutiles. La loi Claes/Léonetti est censée permettre de mourir dans la dignité. On est encore loin de l’objectif…
Sur une question de la salle, elle a expliqué pourquoi la loi Claes/Léonetti nous amène à une situation « pire » qu’avant la législation. En France, la loi sur la fin de vie et ses révisions ont été conçues par des hommes qui sont résolument contre l’euthanasie : Jean Léonetti et Didier Sicard. Avant la loi, les médecins pratiquaient l’euthanasie dans le silence de la loi. Après cette loi, les équipes médicales sont sous la logique sclérosante de cette mauvaise loi et sont beaucoup moins libres. C’est l’exemple même d’une loi qui aliène plutôt qu’elle n’émancipe.
Et pour finir nous avons le plaisir de vous faire partager un commentaire reçu à chaud :
« Outre le film de grande qualité et la bonne surprise de retrouver une ancienne de mon école secondaire, j’ai beaucoup apprécié les commentaires d’Emmanuelle Huisman-Perrin qui ouvraient à la réflexion mais aussi nous faisait bien mesurer la rigidité de la loi française et l’ampleur de la révolution à opérer pour faire évoluer les choses . » Marie
Pour voir ou revoir le documentaire, vous pouvez le louer Accès à la vidéo de Quark productions
Article de Anne-Marie Lambert – Marianne Lederer
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